Lynda Lemay se lâche

 

En tournée avec son opéra folk « Un éternel hiver », la chanteuse québécoise y développe l'univers tourmenté qu'on retrouve dans ses disques. Au même moment sort son nouvel album, imprégné d'une vision très pessimiste de l'amour. Nantes (Loire-Atlantique

BAVARD et inclassable, « Un éternel hiver » ressemble à son auteur. Sur les routes de France jusqu'en juin avec cet « opéra folk » et dans les bacs des disquaires avec son nouvel album « Un paradis quelque part » (lire ci-dessous), Lynda Lemay est sur tous les fronts. Avant-hier soir, à Nantes, la chanteuse et sa troupe donnaient à la Cité des congrès une représentation de ce singulier spectacle musical, aux dialogues entièrement chantés, qui ne ressemble à rien de connu.

Ce drame à cinq personnages ne repose pas sur un classique de la littérature mais sur la description d'un quart-monde très contemporain. L'argument : dans un village de la campagne québécoise, Manon vit une passion orageuse avec Jeff sous les regards désapprobateurs de Micheline, sa mère, et de Daniel, un policier amoureux d'elle. Alors qu'ils viennent d'avoir leur premier enfant, Jeff est emprisonné pour avoir tué un homme lors d'un règlement de comptes entre dealers. Désormais libre, Manon se marie avec Daniel...

Entourée de comédiens chanteurs

De quoi surprendre un public nantais attentif, qui ne s'attendait certainement pas à une conclusion aussi pesante. Ecrit, composé, mis en scène et interprété par Lynda Lemay, « Un éternel hiver » ne dépare pas l'univers décliné depuis quinze ans par la Québécoise au fil de ses dix albums. Avec son style direct et son inspiration foisonnante, celle qui fut un temps la compagne de l'humoriste Laurent Gerra s'est bâti une place majeure dans la chanson française, distillant à coup d'humour ravageur et d'images crues des tranches de vie à faire douter de l'espèce humaine. Dans la veine réaliste des Damia et autres Fréhel, mais terriblement contemporaine, Lynda Lemay est, à 38 ans, une vraie chanteuse populaire, brillante sur scène et vendant ses disques par centaines de milliers. Entre ses décors réduits à un bar, un canapé et un parloir de prison, son habillage folk et ses formules chocs, « Un éternel hiver » condense en plus de deux heures son talent narratif, mais aussi ses manies et ses défauts. Dans la première partie, trop généreuse, elle dilue la présentation des personnages dans une profusion de mots. Des redondances heureusement vite oubliées pendant la deuxième partie, plus nerveuse jusqu'au dénouement. Quant aux quatre comédiens chanteurs québécois qui l'entourent, ils sont tous impeccables dans cet exercice de « théâtre chanté » rappelant le cinéma musical de Jacques Demy.

« Un éternel hiver » reprend le 13 avril à Lausanne. Puis les 14 et 15 mars à Montreux, le 17 mars à Vichy, le 18 mars à Montceau-les- Mines, le 19 mars à Voiron, Les 20, 21 et 22 mars à Lyon, le 23 mars à Besançon, les 11, 12 avril à Bruxelles, le 13 avril à Liège, le 15 avril à Thionville, le 16 avril à Issy-les- Moulineaux, le 18 avril à Brest, le 20 avril à Amiens, les 8 et 9 mai à Marseille, le 10 mai à Montpellier, les 12 et 13 mai à Clermont-Ferrand, le 14 mais à Limoges, le 16 mai à Nevers, le 17 mai à Saint-Etienne, le 18 mai à Tours et du 7 au 12 juin au Casino de Paris.

 
Dans « Un éternel hiver », l'opéra folk qu'elle a entièrement imaginé et conçu, Lynda Lemay raconte, uniquement en chantant, le triste destin amoureux de la jeune Manon.   (ANGELI/BORDE.)

Sébastien Catroux
Le Parisien , jeudi 24 février 2005