Le samedi 26 février 2005

 

Lynda Lemay 

 

Du pareil au même

Alexandre Vigneault

La Presse

Revoilà Lynda Lemay, celle qui écrit plus vite que son ombre. Un paradis quelque part, c'est ce fameux album « imprévu » dont elle parlait l'an dernier, ce disque qui s'est écrit tout seul, parallèlement à celui d'avant et à son « opéra-folk » intitulé Un éternel hiver, créé à Lille, il y a tout juste un mois. Une autre collection de chansons qui ne déroge en rien, ou si peu, de sa manière verbeuse et appuyée.

Son terrain de jeux (de mots), c'est encore et toujours l'intime. Lynda Lemay cherche encore à révéler ce qui se terre dans les silences embarrassés ou dans la brume d'un regard fuyant. Elle évoque la fausse couche en quatre paragraphe bien tassés dans J't'ai pas entendu mourir. Elle plaint un père alcoolique dans On te ramasse. Elle met en scène les tourments d'une fille qui ne veut ni voir sa mère souffrir ni la voir mourir dans Paul-Émile a des fleurs.

Sur un ton moins larmoyant, elle relate avec un (grand) sourire en coin une visite chez le dentiste, ce qui lui fait songer que Monica (Lewinsky, stagiaire chérie de Clinton) avait peut-être la mâchoire gelée lors de ses visites dans le bureau Ovale « puisque c'est par le bas / qu'elle fumait des cigares ». Elle s'épanche ensuite sur le mal de l'air et prend un ton faussement dramatique pour se moquer de son âge. Unique surprise, Kevin Parent participe à la chanson Les Torchons, duo alambiqué qui multiplie les détournements d'expressions populaires et mise très fort sur sa chute: « Si c'est vrai que le temps, c'est du foin / j'ai une moyenne botte de crédit! »

 



Bien sûr, ceux que les caricatures de Lynda Lemay font déjà rire continueront de se taper sur les cuisses. Ceux que ses portraits intimes font déjà larmoyer continueront de renifler. En revanche, ceux qui trouvent qu'elle écrit trop- pas mal, juste trop, sans élaguer- continueront de trouver les fils de ses chansons gros comme des lignes à haute tension ou d'être irrités par son ton souvent infantilisant et sa manière de surjouer ses textes. Ceux-là trouveront peut-être, comme moi, que la chanson Les Canards, où il est question de la noyade d'un enfant, est l'exemple parfait d'un dérapage à la Lynda Lemay: une idée potentiellement poétique... gâchée par trop de banalités.

+: Pas de Ça sent le bébé

-: Tout y est trop dit