La Canadienne défend son nouvel album et son opéra folk
BRUXELLES Lynda Lemay était de passage à Bruxelles lundi et mardi pour présenter son opéra folk, Un éternel hiver. Mais là n'est pas la seule actualité de la longiligne Canadienne: elle a sorti il y a peu un nouvel album, Un paradis quelque part. Nous avons rencontré cette grande bavarde à l'accent charmant qui s'est épanchée sur ses deux projets, à grand renfort de gestes et d'éclats de rire.
Pour lancer deux projets comme ça, il faut une sacrée inspiration!
«Il y a une période, quand je sortais l'album et que je débutais l'opéra, je me suis dit que j'étais un peu folle. Et puis je suis maman et la responsabilité familiale est ma priorité. Tout ça en même temps, ça faisait beaucoup. Mais là, les choses se placent...»
Vous aviez besoin de commencer tout de suite l'opéra folk?
«En fait, c'est l'album qui n'était pas prévu. Pendant l'été, j'ai écrit tant de chansons que j'ai eu envie d'en faire un album. On est entrés en studio, c'était très spontané, on n'avait même pas de date de sortie...»
L'album s'appelle Un paradis quelque part. Ce titre s'est imposé d'emblée?
«Non. Il était d'abord censé s'appeler Imprévu, parce que c'était ça: on n'a pas fait de préproduction, on entrait le matin sans savoir quelle chanson on allait travailler. Je voulais que ça se ressente en écoutant l'album: cette magie de la première fois... D'habitude, on enregistre la chanson sur une démo, puis on la reproduit dans le studio, on dirait qu'on perd un peu de cette magie. Donc il devait s'appeler Imprévu... Puis dans les thèmes abordés dans l'album - je parle de la vie, de tous ses déchirements, de la mort... -, il y avait une chanson qui s'appelait Un paradis quelque part, elle était pleine d'espoir... Ça équilibre la tristesse des autres chansons.»
Vous abordez le thème de l'acharnement thérapeutique...
«Les thèmes à grand débat me touchent... Qu'on parle d'avortement, d'acharnement thérapeutique, on cherche la bonne solution. Des solutions, il y en a... mais la bonne, ça... Comment peut-on juger de la décision de quelqu'un alors qu'on n'est pas dans sa vie? Mes chansons démontrent que, dans une même personne, il peut y avoir les deux côtés. C'est le cas dans Paul-Emile a des fleurs. Cette chanson démontre qu'il ne faut pas juger parce que, dans ce genre de situation, on ne sait pas nous-mêmes quelle décision on prendrait.»
Dans J't'ai pas entendu mourir et Les Canards, vous parlez de la mort d'un enfant...
«C'est des peurs de parents, ça... J'écris souvent sur mes angoisses de mère. Dans l'opéra, c'est la même chose. Comme pour exorciser mes peurs, je vais aller là où je ne voudrais jamais que ma vie aille. Ça me fait du bien de me mettre en pleine face certaines réalités en chanson: ça me débarrasse de mes peurs. Ça me secoue et me donne l'impression de faire de meilleurs choix peut-être.»
En parlant d'angoisse, vous avez peur du dentiste?
(Elle rit) «Je viens d'y aller, je ne sais pas s'il a entendu la chanson (Monsieur Marchant, NdlR). Je vais voir: si le travail est bien fait, c'est qu'il n'a pas écouté l'album!»
Les chansons d'amour de cet album sont assez tristes: Qu'est-ce qu'on va devenir, mon homme, Je te trompe...
«Je te trompe est mal comprise. J'ai retrouvé cette chanson au fond d'un tiroir. J'ai voulu faire connaître la musique d'Erik Mongrain. J'ai essayé de trouver un texte qui s'accordait parfaitement avec sa musique. C'était Je te trompe. Cette chanson c'est une femme qui dit à son homme: notre histoire n'est pas si sérieuse que ça, si je dois choisir entre toi et ma carrière, je te quitterais.»
C'est votre cas?
«Je ne peux plus me passer de ma carrière. Il y a des gens qui ont des grands rêves, mais qui ne trouvent pas le chemin pour y accéder. Et moi, je vois que les portes ne cessent de s'ouvrir devant moi. C'est extraordinaire d'avoir un public aussi fidèle, aussi intéressé. J'ai envie de profiter de cette belle vie-là qui m'est offerte.»
Lynda Lemay, Un paradis quelque part (Warner).